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2 / Historique de la notion de développement durable et apports relatifs à l’éducation

Les années soixante-dix sont marquées par l’apparition progressive d’une sensibilité écologique en opposition à l’idéal de croissance économique. Elle va notamment trouver expression en 1972 au travers d’une simulation informatique réalisée à la demande du Club de Rome[1] par le Professeur Dennis Meadows du Massachussetts Institute of Technology (MIT).

Cette étude avance que les perturbations des cycles naturels causées par une activité économique effrénée et une croissance démographique exponentielle vont aboutir d’ici (1972) à une centaine d’année au non-renouvellement des ressources naturelles, les limites de la planète étant atteintes, et entraîner à terme une chute de la capacité industrielle et de la population. Le Rapport Meadows prône l’utilisation sélective des progrès technologiques et l’action immédiate sur les niveaux de population et sur le capital (de façon schématique l’arrêt total de la croissance économique). Le tollé engendré par son slogan "Halte à la croissance !"[2] contribuera largement à sa médiatisation !

La même année, la Conférence de Stockholm, convoquée à l’initiative de l’Organisation des Nations Unies (ONU) pose les bases d’une législation internationale de l’environnement en élaborant un plan de lutte contre la pollution et un plan d’action contre le sous-développement. Regroupant 113 Etats, elle réalise un premier compromis entre impératifs économiques et écologiques en concluant que même si la croissance économique n’est pas condamnable, elle n’en doit pas moins être écologiquement viable et bénéfique à l’être humain.

Dans le même temps l’ONU décide de la création du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), organisme qu’elle charge d’élaborer des textes en faveur de l’environnement. Le PNUE sera à l’origine de la Convention de Vienne du 22 mars 1985 sur la couche d’ozone, de son complément le protocole de Montréal le 16 septembre 1987 et de la convention de Bâle du 22 mars 1989 relative au contrôle des mouvements transfrontaliers et à l’élimination des déchets dangereux.

Néanmoins si l’environnement est à Stockholm à l’ordre du jour, il n’en est encore que très peu du développement car on n’associe guère à l’époque les deux notions.[3]La préoccupation de l’opinion publique comme des programmes est alors centrée sur les effets négatifs de l’industrialisation telle la pollution et le risque nucléaire. Désireux de remédier par la croissance à la pauvreté qui l’accable, le Tiers Monde lui-même ne considère pas encore l’environnement comme une priorité.

Explosion démographique, paupérisation épidémique des pays du Sud, aggravation des atteintes portées à la planète, développement progressif de la sensibilité écologique et contexte politique favorable[4] vont progressivement faire évoluer la situation.

Soucieuse d’élaborer des solutions susceptibles de répondre au dilemme "développement ou environnement" l’ONU réunit en 1983 une Commission mondiale de l’Environnement et du Développement (CNUED) présidée par le Premier ministre norvégien Mme Gro Harlem Brundtland.

La Commission rend son rapport en 1987. Baptisé "Notre Avenir à Tous[5]", il préconise la mise en place de stratégies de développement dans les pays conscients des limites des capacités de l’écosystème à se régénérer et à absorber les déchets. Prônant la prise en compte dans la réflexion sur le développement économique de la qualité de la relation entre homme et  milieu naturel, le Rapport Brundtland souligne également "l’interaction écologique entre les nations" et affirme que l’éradication de la pauvreté est une condition fondamentale et indispensable à un développement écologiquement viable. Le progrès doit tenir compte du droit de chacun à réaliser son plein potentiel. C’est l’avènement officiel du Développement Durable.

Dans la lignée du Rapport Brundtland s’organise une dynamique autour de la notion, elle débouchera en 1992 sur la Conférence de Rio.

Attendue par beaucoup comme "la conférence de l’espoir" la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement, encore appelée "Sommet de la Terre" se tient à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992. Elle rassemble 182 Etats ainsi qu’un nombre considérable d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) qui seront dans le même temps réunies en forum. Phénomène nouveau, la Conférence fera d’ailleurs place plus importante à la société civile, qu’elle soit celle des chefs d’entreprises, des syndicats, des élus locaux, mais également des jeunes et des femmes.

Premier sommet Nord-Sud elle adopte une Déclaration sur l’environnement et le développement dont les 27 principes définissent les droits et les responsabilités des Etats en la matière, ainsi qu’une Déclaration de principe relative à la gestion durable des forêts à l’échelle mondiale. Elle génère également une recommandation pour une convention sur la désertification ainsi que deux conventions ayant force obligatoire et signées par les représentants de plus de 150 pays : la Convention sur les changements climatiques et celle sur la diversité biologique.

Elle adopte enfin le 14 janvier 1992 l’Agenda 21, un rapport-document préparatoire à l’Action 21. Celui-ci est défini par l’article 1.3 du Préambule de l’Agenda comme "un programme qui reflète un consensus mondial et un engagement politique au niveau le plus élevé sur la coopération en matière de développement et d’environnement". Sa bonne application "est la première et la plus importante des responsabilités des gouvernements".

Il se veut "un nouveau partenariat mondial pour le Développement Durable" (article 1.6). Programme détaillé tout au long de ses 40 chapitres, le texte envisage diverses problématiques dont celle de l’éducation - sensibilisation du public. Ajoutons d’ores et déjà que cette construction, pour autant qu’elle se veuille animée des meilleures intentions, n’a aucune force juridique obligatoire. Lorsque l’on s’adresse à des Etats souverains, il ne peut par définition en être autrement.

Action 21 reconnaît tout d’abord le lien entre éléments économiques et nécessité d’un environnement naturel sûr et stable. Par cet accord les signataires s’engagent à renforcer les points de rencontre entre ces deux pôles, qu’il s’agisse de le faire au plan international ou dans leurs politiques intérieures. Ils se prononcent notamment en faveur d’une libéralisation du commerce, du soutien mutuel entre économie et environnement, et dans le développement de politiques macro-économiques avantageuses pour l’une comme pour l’autre. Plus précisément les Etats souhaitent favoriser par l’établissement d’un système d’échanges multilatéral une meilleure allocation et une meilleure utilisation des ressources, augmenter la production et les recettes, diminuer par là la pression sur les ressources existantes, en dégager de nouvelles tout en protégeant le milieu, celui-ci devant alors garantir à son tour la présence de richesses exploitables.

Il ne s’agit donc pas d’une stratégie d’augmentation de la production ne tenant pas compte de la durabilité des ressources, mais il ne s’agit pas non plus de gérer ces ressources, fut-ce  rationnellement, sans tenir compte de ceux qui en dépendent pour assurer leur existence. La lutte contre la pauvreté implique donc la considération de la question démographique.

L’investissement, la coopération et le règlement de la dette des pays en développement sont également au nombre des objectifs majeurs du programme.

Relativement à l’éducation et à la sensibilisation du public, la Conférence de Rio a souhaité développer trois thèmes particuliers : la réorientation de l’éducation vers un développement durable, une meilleure sensibilisation du public et la promotion de la formation. Ces divers points sont développés dans le chapitre 36 de l’Agenda. Ses propositions s’inspirent des principes fondamentaux de la déclaration et des recommandations de la Conférence intergouvernementale de Tbilissi sur l’éducation relative à l’environnement de 1977, et de ceux de la Conférence mondiale pour l’éducation pour tous de Jomtien de 1990.

Le chapitre 36 définit dans un premier temps l’éducation comme "un processus permettant aux êtres humains et aux sociétés de réaliser leur plein potentiel . L’éducation revêt une importance critique pour ce qui est de promouvoir un développement durable et d’améliorer la capacité des individus à s’attaquer aux problèmes d’environnement et de développement".

Qu’elle se fasse par l’école ou par d’autres moyens elle est "indispensable pour modifier les attitudes […] susciter une conscience des questions écologiques et éthiques, ainsi que […] des compétences et un comportement compatible avec le développement durable et pour assurer une participation effective du public aux prises de décisions".

Le premier objectif est d’assurer un accès universel à l’éducation de base de sorte que 80 % des filles comme des garçons reçoivent un enseignement primaire, scolaire ou non, et que l’analphabétisme des adultes soit mis en recul. Il constitue en effet  l’un des principaux freins à toute démarche pédagogique.

Au regard du développement durable la question de l’éducation touche plus particulièrement deux problématiques :

Elle concerne dans un premier temps la question du problème démographique et celle de l’émancipation des femmes.

Le chapitre V de l’Agenda souligne la nécessité d’instruire les diverses couches de la société des pays en développements, en particulier les femmes, sur les interactions existant entre facteurs et tendances démographiques et utilisation des ressources locales disponibles. Ce travail qui peut ressortir aussi bien de programmes scolaires que non scolaires doit également lier démographie, protection de l’environnement et soins primaires. Le texte ajoute qu’il conviendrait de faire connaître les liens fondamentaux entre l’amélioration des conditions de la femme et la dynamique démographique, ce par l’accès à l’éducation, mais également à des programmes de santé primaires, de soins de santé reproductive, et par l’accès des femmes à l’indépendance économique et à la prise de décision. Leur faire prendre conscience de leur rôle de consommatrices est également l’un des objectifs du chapitre.

Rappelant l’existence d’un certain nombre de textes internationaux en faveur de leur intégration réelle au sein des activités de développement[6], le chapitre 24 précise qu’il convient d’accroître le nombre de femmes aux postes de décisions et de vulgarisation en matière d’environnement et d’éliminer tout obstacle juridique, économique, social ou culturel à cette participation. Le chapitre 36 précise qu’il est nécessaire de renforcer les possibilités offertes aux femmes d’intégrer les disciplines non traditionnelles et de supprimer les stéréotypes dont elles font l’objet dans les programmes d’enseignement. La priorité doit notamment être accordée à l’alphabétisation des jeunes femmes, lesquelles doivent être soutenues par la création de garderies d’enfants. Concernant l’éducation au respect de l’eau, l’alphabétisation des femmes dans les pays en développement est d’une importance capitale, la femme jouant, au sein du foyer comme de la communauté, un rôle essentiel sur le plan de la sécurité alimentaire, de la nutrition et de l’approvisionnement en eau, dont elle est aussi la première utilisatrice. Le rapport "Atténuation de la pauvreté et agriculture irriguée" publié en 1999 par l’IPTRID (FAO) souligne que le droit des femmes de détenir des terres irriguées et de contrôler la distribution des produits en Gambie, en Tanzanie, et au Kenya a considérablement amélioré la nutrition des familles et les revenus des ménages dirigés par des femmes.

L’éducation au même titre que le système juridique doit enfin se voir dotée des moyens propres à assurer l’égalité entre les deux sexes.

La question de l’éducation concerne dans un deuxième temps la sensibilisation du public à l’interaction entre l’environnement et l’activité humaine, et l’intégration des données socio-économiques et des questions d’environnement dans le processus décisionnel. Cela doit passer par une plus grande participation du public, et pour cela, par la mise en place de mécanismes d’analyse et d’évaluation d’ensemble des effets de chaque décision. L’instauration de mécanismes facilitant l’accès direct du grand public comme des groupes spéciaux à l’information est là aussi fondamentale. Les pays – et notamment les pays en développement – doivent à cette fin améliorer la qualité de leur enseignement scolaire comme celle de leur formation technique en y intégrant les questions d’environnement ainsi que les questions d’économie se rapportant au développement. Les écoles doivent recevoir une aide afin de développer des activités écologiques concrètes intégrant la participation de leurs élèves à des travaux d’intérêt public. Au nombre des domaines envisagés par le texte se trouve l’eau potable.

Cette information et cette participation des citoyens ne peut se faire qu’en ayant recours à l’appui de lois et de réglementations adaptées à chaque pays, et assorties d’autorités garantissant leur application. Gouvernements et législateurs doivent également s’attacher à la création de procédures permettant la sanction de tout acte illégal ou contraire à des principes de droit et qui aurait des conséquences sur l’environnement. L’Action 21 suggère là aussi une coopération juridique Nord-Sud et sollicite en particulier les ONG :

Tout d’abord, pour une diffusion de l’information relative aux innovations juridiques en matière d’environnement et de développement afin d’inciter à leur adoption.

Ensuite, pour un apport à ceux qui en feraient la demande d’une aide à la modernisation de leur système, compte tenu de leurs valeurs et de leurs infrastructures. Cette coopération serait matérielle comme intellectuelle et passerait notamment par la création de programmes  de formation aux pédagogies de l’environnement. Ces derniers seraient adressés aux différents acteurs pouvant détenir une fonction d’éducation. L’Action 21 suggère enfin la création de réseaux et de "centres d’excellence" chargés de développer une recherche environnementale transdisciplinaire.

En dernier lieu, pour favoriser l’émergence d’une incitation à l’élaboration de programmes assurant le respect des normes nationales ou internationales adoptées en matière d’environnement.

L’évaluation par les gouvernements de ces nouvelles réglementations pourrait là-encore être associée à la création d’ateliers pédagogiques, de conférences ou de programmes éducatifs à destination des citoyens comme des fonctionnaires chargés de les appliquer. Le document prévoit encore l’attribution aux particuliers d’ un droit d’action en justice et de participation à la genèse de ces différents mécanismes. Une volonté d’associer jeunesse et populations autochtones à la gestion environnementale est également avancée.

L’Agenda 21, s’il propose un programme d’action innovant, adopté sous forme de recommandations n’en demeure pas moins dépourvu de force contraignante. S’il définit plus d’objectifs à atteindre que de moyens pour y parvenir il a cependant le mérite de sensibiliser et de participer à la diffusion d’un idéal constructif.

Suite à la Conférence de Rio, les Nations Unies créèrent une Commission pour le Développement Durable en charge de la coordination des accords d’Action 21 et du contrôle de ses progrès.

Faisant le bilan de la mise en œuvre de ce dernier, l’Assemblée générale de l’ONU réunie en session extraordinaire à New York du 23 au 27 juin 1997 a constaté son échec relatif, les politiques ne parvenant pas à trouver la voie d’une déclaration commune. Un prochain rendez-vous devrait avoir lieu en 2002.

Depuis la Conférence de Rio, l’Organisation travaille à l’élaboration des instruments juridiques intégrant les principes du Développement Durable.


[1] Créé à l’initiative de l’industriel italien Aurelio Peccei, le Club de Rome est un regroupement d’économistes, de scientifiques et de décideurs publics comme privés. Association de droit helvétique il s’est donné pour but l’étude de l’activité de l’humanité envisagée comme un système global à l’échelon mondial pour résoudre les problèmes nationaux. Sa première rencontre se fît à Rome en 1968.

[2] "Zero Economics Growth" en anglais.

[3] Toutefois M. Maurice Strong, Secrétaire Général de la conférence – et qui occupera le même poste à Rio 20 ans plus tard – lance l’idée d’un "écodéveloppement" utilisant rationnellement à l’échelle locale et régionale les ressources humaines et naturelles de la planète.

[4] Dès le milieu des années 50 les pays du Tiers Monde nouvellement indépendants font leur apparition sur la scène internationale et occupent bientôt une position importante au sein de l’Assemblée générale des Nations Unies. Craignant que les soucis écologiques des pays industrialisés ne les privent de la croissance nécessaire à leur développement, ils commencent à faire valoir l’idée que si le développement doit être économiquement viable, il doit aussi s’accompagner d’une modification des relations Nord-Sud, notamment sur les plans des échanges commerciaux et financiers.

[5] "Our Common Future" en anglais.

[6] Il s’agit de la Convention sur l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard des femmes (résolution 34/180 de l’Assemblée générale de l’ONU, de la Déclaration mondiale sur la survie, la protection et le développement de l’enfant et son plan d’action pour son application (A/45/625), et des Stratégies prospectives d’action de Nairobi pour la promotion de la femme. Le chapitre 24 fait également allusion à des textes de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO en anglais pour United Nations Educational Scientific and Cultural Organization.) Ajoutons pour conclure la Déclaration de la Quatrième Conférence Mondiale sur les Femmes tenue à Beijing du 4 au 15 septembre 1995.

 

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