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Exposé Intégral |
B / "Les actions partenariales" Les expériences pédagogiques dont il va être question ici sont issues d’une collaboration entre établissements d’enseignement scolaire, collectivités locales et milieu associatif. Elles ont toutes pour point commun d’avoir permis à des enfants ou à des jeunes d’aborder un ensemble plus ou moins étendu de questions relatives au problème de l’eau. A ce titre je serai personnellement tenté de les joindre à la catégorie "classes d’eau". Toutefois, elles s’en distinguent à mon avis par le fait qu’elles n’ont pas pour origine une volonté purement interne à l’établissement mais qu’elles s’inscrivent et se rattachent à un dispositif extérieur. C’est la raison pour laquelle j’ai préféré parler de partenariat. Une autre différence me semble t’il est le fait que les réalisations effectuées par le groupe vont dépasser le cadre de celui-ci et vont prendre un caractère réellement public, débouchant par exemple sur la commercialisation d’un produit éducatif ou la création d’une tournée de spectacle. Elles pourront également exprimer un intérêt pour la chose publique, par l’embellissement ou la réhabilitation d’une zone géographique au moyen d’une création ou d’un aménagement. Un exemple type de partenariats est l’opération "1000 défis pour ma planète". D’origine interministérielle – elle regroupe Environnement, Education Nationale, Agriculture et Jeunesse et sports – cette initiative vise la pratique de l’éducation à l’environnement en proposant à des jeunes allant de la maternelle à la vingtaine de mener à bien des actions concrètes d’amélioration, de protection et de gestion de l’environnement. Les projets peuvent être scolaires, associatifs, individuels, et sont dans tous les cas soutenus par l’intervention de partenaires extérieurs et appuyés par un parrain technique garantissant la rigueur scientifique et une partie du financement. Sélectionnés régionalement les défis sont présentés en juin lors des journées de l’environnement. Voici quelques exemples d’opérations qui ont concerné l’eau : "Eau secours !" qui à l’initiative du Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne (MRJC) de Kuttolsheim (Bas-Rhin) déboucha sur la création d’un sentier pédagogique de découverte d’un site. Le projet rassembla sur un an 15 jeunes de 14 à 18 ans et 20 de 18 à 25 ans, le parrainage technique étant assuré par la commune et l’encadrement par les animateurs du mouvement. Dès septembre 1993 le MRJC du Bas-Rhin se lança dans une opération en faveur de la protection de l’eau. Une première phase de sensibilisation fût entreprise avec la délimitation par les jeunes des bassins hydrographiques, l’étude de la pollution des cours d’eau, la réalisations d’analyses physico-chimiques et biologiques et celle d’une enquête sur les politiques menées par la commune. Différents partenaires fournirent les enseignements techniques, culturels et spirituels nécessaires à la procédure. Les équipes présentèrent leurs résultats en mai 1994 sous la forme d’une exposition et d’une comédie musicale. Le spectacle eût lieu lors d’une grande fête de l’eau à laquelle assistèrent plus de 500 personnes. Par la suite une équipe de jeunes réalisa une vidéocassette du spectacle tandis qu’une autre conçut un sentier balisé sur 4 km, comprenant seize panneaux rédigés en français et en allemand et proposant une découverte écologique et culturelle de l’eau. Ces aménagements se firent lors d’un chantier de jeunes franco-allemand durant l’été 1995. "Dame Bleue et Dame Nature" concerna pour sa part l’élaboration d’outils de sensibilisation sur la commune de Ceyrat (Puy de Dôme). Porté par le Centre de Loisirs sans Hébergement Albert Camus de Ceyrat, il regroupa pendant huit mois 25 enfants de moins de 6 ans, 40 enfants de 6 à 11 ans et 15 de 11 à 14 ans, le parrainage étant assuré par la commune, l’Association Espaces et Recherches ainsi que le Parc naturel régional des volcans d’Auvergne. L’encadrement fût assuré par les animateurs du Centre et du personnel technique de la commune. Un premier travail lancé en 1993 aboutit à la création d’un sentier arboricole et d’un topo-guide, "Dame Nature". Les devoirs du citoyen vis à vis de l’eau y furent rassemblés dans une charte de l’eau, "Dame Bleue". Le CLSH souhaita prolonger cette action par une phase de sensibilisation durant laquelle les enfants purent découvrir de façon ludique les propriétés de l’eau, par une étape de visites et d’ateliers de travail, durant laquelle ils purent découvrir les aspects techniques de l’eau, et enfin par une phase de valorisation du travail réalisé. L’initiative s’appuya sur la présence de nombreux sites sur la commune (fontaines, lavoirs, ruisseaux…) s’y prêtant. Les enfants furent initiés aux techniques de coulage de dalles et conçurent une marelle dont le thème de jeu reprenait le cycle de l’eau. Vinrent s’y ajouter des maquettes et un jeu de dominos sur les "petites bêtes" de la rivière. Le livret d’eau fut largement diffusé par le Centre Régional de Documentation Pédagogique (CRDP) et est toujours en vente à la mairie pour la somme modique de dix francs. La marelle qui devait en revanche faire l’objet d’une exposition sur la commune existe physiquement mais n’a pas encore trouvé d’emplacement pour la recevoir. Elle demeure stockée dans un atelier. Le Centre poursuit également son œuvre de sensibilisation, l’actuelle direction visant à diversifier activités et sujets traités afin de ne pas susciter de lassitude parmi les enfants. Après avoir abordé l’eau, la nature, puis la faune le Centre aborde aujourd’hui le recyclage. Il poursuit ses expositions notamment durant Expo-sciences où il a récemment présenté une maquette géante. Son actuelle directrice, Mme Camp me confia lors d’un entretien téléphonique que la difficulté d’un projet de type "Dame Nature", étalé sur un an, est de ne pas pénaliser les enfants en leur faisant toujours faire le même type d’activité, la nature fût-elle un thème très large. Il est un moment où ils manifestent le désir de passer à autre chose. Un CLSH ayant avant tout pour but de permettre à des enfants de se distraire il ne doit pas être pour eux un lieu de travail. Il me fait plaisir de retranscrire cette remarque au sein de cet exposé car non seulement j’y souscris mais aussi parce qu’elle est, je le crois, emprunte de bon sens et qu’elle témoigne enfin d’une grande conscience professionnelle. Pour avoir moi-même travaillé en Centre aéré je me suis souvent interrogé sur le sort de ces pauvres enfants que l’on dépose le matin et que l’on confie somme toute à de parfaits inconnus. Même si les crises de larmes restent rares, je suis bien certain qu’ils aimeraient cent fois être ailleurs si le choix leur en était donné. Certains ont des parents obligés de travailler, d’autres n’ont pas de parents, certains sont battus, d’autres handicapés, certains souffrent de troubles psychiques et d’autres enfin auront Dieu merci un ciel plus bleu. Animateurs et directeurs de CLSH ont donc sur leurs épaules une responsabilité énorme, responsabilité dont on parle souvent relativement à son volet juridique, mais responsabilité humaine avant tout, responsabilité de vie. L’équipe d’animation est tenue de préparer l’ensemble de ses activités dans le cadre d’un projet pédagogique et chacun de ses membres a le devoir de préparer, à l’avance et non pas dans l’urgence, chacune de ses activités, le matériel et les costumes dont il aura besoin, son « texte » et les mesures de sécurité. S’il faut y passer le week-end ou ses soirées c’est tant pis. C’est un travail de professionnel et s’il est un certain nombre de gens qui ont les compétences et surtout la volonté de l’assurer, et d’en assumer toutes les conséquences, agréables ou plus difficiles, force est de reconnaître que c’est loin d’être toujours le cas. Et s’il est bien une chose qui me déçoit profondément c’est bien de voir que l’on confie parfois des groupes d’enfants à des jeunes gens à peine sortis de l’adolescence et qui, venus uniquement pour se gagner quelque argent, n’ont pas encore la moindre notion de ce que peut être un travail. J’y ai déjà fait allusion un peu plus haut. Des animatrices revêches et criardes, des animateurs prenant leurs pauses lors des moments importants de la journée, des gens qui ne veulent pas se donner la peine de faire le sacrifice de quelques heures supplémentaires… Responsabilités de vies. L’opération "Pour des classes de Loire, au fil de l’eau" a permis quant à elle la création d’une "toue" bateau traditionnel de Loire et l’appréhension par des jeunes (13 de 14 à 18 ans, et 4 de 18 à 25) du contexte socio-économique local. Mené à bien par le Lycée agricole de Tours-Fondettes et par son équipe éducative, le projet fût soutenu par le Crédit agricole, par EDF centrale d’Avoine ainsi que par les Bateliers de Saint-Etienne-de-Chigny et de Savonnières. L’objectif poursuivi était la mise en place d’une structure de classe de Loire. Le projet entra dans le domaine du possible grâce à la conjonction de trois éléments : l’idée d’une association locale de construire un bateau traditionnel : la toue ; le plan d’aménagement du fleuve qui rendait le sujet d’actualité ; l’existence d’une classe de Sciences et Techniques de l’Agronomie et de l’Environnement. Elèves comme enseignants souhaitèrent participer à la redécouverte et à la renaissance du fleuve tout en contribuant à un développement local respectueux de l’environnement, "Pour que la Loire devienne le support vivant d’une pédagogie de l’environnement centrée sur les relations entretenues depuis longtemps entre l’homme et le fleuve". Ayant effectué un diagnostic des atouts et des contraintes de la commune de Saint-Etienne-de-Chigny, les jeunes ont pu comprendre en quoi ses milieux naturel, économique et social pouvaient intervenir positivement dans la création d’une classe de Loire. Après avoir établi un programme d’animations par ville étape ils élaborèrent avec l’aide d’un réalisateur professionnel un film de sensibilisation "ma classe de Loire" qu’ils projetèrent dans les écoles primaires. Ils s’investirent également dans la création de la toue et de son ponton flottant et dans l’aménagement des bords de la Bresme. Ce défi leur permit enfin de rencontrer et d’impliquer les divers acteurs économiques et politiques locaux. "Favoriser la vie animale et végétale autour d’une mare" fût le défi relevé par 21 enfants de moins de 6 ans et 47 enfants âgés de 6 à 11 ans sous les auspices du Regroupement Pédagogique Intercommunal (RPI) du Bourg-Dun. L’opération se déroula sur 7 mois, son parrainage étant assuré par les Mairies du RPI, l’Office National des Forêts (ONF), et le jardin botanique du Mesnil-Durdent. Nous sommes ici en Seine-Maritime. C’est à l’occasion d’une étude réalisée en 1993 sur les possibilités pédagogiques du jardin que son animatrice et les enseignants du RPI conçoivent l’idée d’une mare pédagogique à proximité de l’école qui permettrait aux enfants d’appréhender les lois qui en régissent l’équilibre. Mais lorsque sa mise en forme est terminée, que ses berges sont aménagées et qu’un raccordement aux eaux pluviales est installé, un constat s’impose : la mare manque de vie. En 1994 les enfants transplantent des plantes d’une rivière voisine, aménagent des abris et créent un mini jardin botanique. Ils ont désormais un sujet d’étude et d’observation tout au long de leur cursus scolaire. Progressivement les observations s’étendirent à la rivière, des échanges eurent lieu avec le collège voisin et un club "à l’école de la rivière" est également créé. L’Ecole élémentaire Casalis à Créteil (Val de Marne) fût pour sa part à l’origine d’un projet d’information et de sensibilisation autour de l’eau, de sa maîtrise et de son partage, et plus particulièrement de sa répartition sur la planète, projet regroupant 60 enfants de 6 à 11 ans. L’encadrement fût assumé par ses enseignants et le parrainage par le Comité français pour la Solidarité internationale (CFSI), la Ville de Créteil, et l’Agence de l’Eau Seine-Normandie. Située dans une Zone d’Enseignement Prioritaire (ZEP) l’Ecole Casalis accueille des enfants considérés comme venant de milieux défavorisés. Quatre de ses classes, deux de CE2, une classe de perfectionnement et une classe accueillant des élèves non francophones se sont organisées depuis des années en ateliers décloisonnés pour les activités sportives et d’arts plastiques. En septembre 1994 leurs enseignants portent leur choix sur le thème de l’eau. Quatre classes d’eau se mirent en place sur deux années et un certain nombre de productions pédagogiques furent réalisées par les enfants : une fresque, un jeu de l’oie publié au journal de la ZEP, le "Mesly Canard", une exposition avec présentation pour petits et parents. Des activités théâtrales et une correspondance avec Cotonou au Bénin prolongèrent l’action en 1995/1996. Le "lagunage du Riez" fût quant à lui mené à l’initiative de l’Association Nord-Nature à Bourghelles (Nord) dans le cadre de l’opération Chico Mendès . Lancée en 1990 par la Fédération Nord-Nature celle-ci a pour objectif de donner aux enfants de la région Nord-Pas de Calais les moyens de recréer un espace nature sur un terrain dégradé de leur commune[1]. L’équipe Chico Mendès intervient auprès des classes qui présentent un projet pédagogique actif, généralement de terrain, et leur fournit du matériel : fiches techniques, dossiers à remplir, malles… L’opération fût en l’occurrence parrainée par le P.VEL Club de Bourghelles (P.VEL pour Paix. Vie Ecologie Locale Club) et par la Direction Départementale de l’Agriculture et de la Forêt. Trente enfants de 6 à 11 ans de l’école de Bourghelles s’approprièrent dès 1991 une ancienne prairie de fauche abritant une décharge sauvage ainsi que le dépôt des boues du curage du Riez, cours d’eau longeant le site. Ils y firent des travaux d’entretien, y plantèrent des arbres, y installèrent des abris, y créèrent une mare. Les élèves du cours moyen étudièrent et aménagèrent la rivière bordant le terrain (en mesurant son indice biotique et en y plantant des branches de saules pour maintenir ses berges). Ils réalisèrent une exposition pour les habitants du village. En 1994/1995 eût lieu l’étude de faisabilité proprement dite du lagunage en termes d’hydrologie, de pollution, de localisation du bassin… Elle se déroula sur six mois. Aux dires de Nord-Nature Chico Mendès le projet semble en être resté là, le P.Vel Club n’ayant aucune information disponible à ce sujet, à notre grand étonnement ! Un dernier exemple, plus proche de notre région cette fois-ci : "Pour que vive l’Ouvèze" qui fût porté et encadré par le Collège de Ventadour à Privas et par le Collège Alex Menzec à Le Pouzin (Ardèche). Regroupant sur 20 mois 400 élèves il eût pour objectif la création d’un document informatique multimédia intégrant les données sur la rivière. Le projet fût parrainé par le Syndicat "Ouvèze vive", par le Conseil régional Rhône-Alpes, et par les Communes de Privas, Floriac, Saint Julien et Le Pouzin. Les deux Collèges furent associés dans le cadre du contrat de rivière car ils se trouvaient chacun à sa source et à son embouchure, et purent ainsi couvrir plus facilement ses 28 km. Ils en dressèrent un état des lieux avant la réalisation des travaux prévus (trois stations d’épuration, un parcours de pêche, une zone de baignade… ) et sensibilisèrent la population aux problèmes de sa gestion. De nombreux partenaires furent mobilisés. Les élèves réalisèrent en 1993/1994 une exposition accompagnée d’une plaquette largement diffusée auprès des habitants. Leur exposition obtint le premier prix de la médiation scientifique d’Expo-Sciences régionale à Chambéry et circula dans les différentes communes de la vallée. En 1995 débuta la réalisation du montage multimédia intégrant les informations sur le tourisme, la pêche, la faune, la flore, la géologie et l’hydrologie. L’équipe d’enseignants, équipe pluridisciplinaire de documentalistes et d’animateurs organisèrent 16 sorties, 9 conférences, 7 ateliers thématiques, un atelier télématique, des ateliers d’Expérimentation Assistée par Ordinateur (EXAO) et un atelier d’art plastiques. La gravure sur CD-Rom fut effectuée en 1996, le programme devant, on le pensait à l’époque, servir à alimenter le serveur des collèges de l’Ardèche, ARDECOL, et à animer des bornes interactives d’information dans les différentes communes de la vallée. Si le disque fut bien réalisé il ne put en revanche s’intégrer à l’ARDECOL en raison d’un formatage incompatible avec la Toile. L’éducation du public au respect de l’eau trouve également sa place dans un certain nombre de conférences, d’expositions, de salons et de journées de l’eau. [1] Chico Mendès est le nom d’un ouvrier récolteur de latex brésilien qui, se révoltant contre la destruction des forêts d’hévéas embrassa la cause syndicale et fût assassiné en 1989 par des promoteurs immobiliers. L’association reprit son nom un an après sa mort.
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