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Exposé Intégral |
3 / Psychologie sociale et économies d’énergie Cette recherche-expérience se déroula à Marseille (Bouches du Rhône) en milieu hospitalier. Durant une phase pré-expérimentale l’établissement fut séparé en deux zones, une zone soumise à l’expérience et une zone de "contrôle", il fut ensuite équipé d’un ensemble de compteurs permettant à des personnes extérieures à l’intervention de mesurer au jour le jour les consommations. L’expérience mobilisa l’ensemble du personnel. Elle débuta par une première phase de pied dans la porte : l’intervenant se présenta comme un chercheur devant effectuer une étude sur les économies d’énergie à la demande de la direction de l’hôpital. Il sollicita l’attention des personnels pendant quelques instants. Il leur fit alors remplir un questionnaire sur les économies d’énergie, acte peu coûteux lui permettant de les engager une première fois dans un cadre d’action, tout en lui donnant la possibilité de connaître leur attitude pré-expérimentale vis à vis du sujet abordé. Il leur expliqua ensuite que si la direction pouvait autoritairement réduire les dépenses d’énergie avec les inconvénients que l’on devine, il était certainement possible d’obtenir des économies qui n’entraîneraient aucune gêne pour les uns ou pour les autres. Il s’agirait pour des volontaires de passer dès à présent un petit entretien de 10 minutes, puis dans une semaine une réunion de 20 minutes durant laquelle le chercheur avancerait quelques propositions. Les volontaires – la quasi totalité du personnel – remplit alors une fiche individuelle d’inscription, nouvel acte engageant, et l’entretien commença. L’expérimentateur demanda individuellement à chacun d’essayer d’imaginer les petits gestes qu’il est possible, dans l’absolu, d’accomplir sans gêne aucune pour réaliser des économies de chauffage. Il leur demanda par la suite d’imaginer ce que eux pensaient pouvoir accomplir de la sorte. Il nota et remercia. La deuxième phase se déroula durant la semaine suivante. Elle prit la forme d’un amorçage. Celui-ci prit place comme prévu à l’occasion de réunions regroupant de 3 à 8 personnes. L’expérimentateur rappela aux volontaires que même si la politique actuelle était à la réduction imposée des dépenses de chauffage, une solution moins gênante pour eux était envisageable, et c’est d’ailleurs ce qu’il ressortait des suggestions qu’eux-mêmes lui avaient faites. Il leur expliqua ensuite que la recherche nécessitait de passer à l’acte et leur demanda de bien vouloir décider quels petits gestes aucunement gênants pour eux ils allaient dès à présent accomplir durant la semaine à venir, le résultat sur la consommation devant leur être fourni lors d’une prochaine réunion. Il donna des exemples issus des entretiens (par exemple ne pas laisser la lumière allumée dans une pièce vide ou ne pas ouvrir la fenêtre lorsque le chauffage est en route) et précisa qu’il s’agirait dès lors de vérifier s’ils seraient comme il le pensait générateurs d’économies et d’aucun préjudice. Il leur rappela également qu’il était encore temps de se désister et que cela ne poserait aucun problème. Sur ce la collectivité s’engagea, chacun ayant décidé et sachant ce qu’il avait à faire. Le chercheur remercia et rendez-vous fut pris pour la semaine suivante. C’est là que débuta une phase d’engrenage. S’assurant d’abord que toutes et tous avaient bien saisi ce qu’ils devaient faire et n’avaient ressenti aucune gêne durant la semaine, le chercheur expliqua qu’une tendance à l’économie se faisait déjà sentir, mais qu’il était encore trop tôt pour en tirer une conclusion définitive, les résultats n’étant pas encore suffisamment nets. Il leur proposa de prolonger l’expérience d’une semaine. Un nouveau rendez-vous fut pris. Lors de la dernière phase furent dressées des mesures post-expérimentales. L’intervenant fit à nouveau remplir le questionnaire initial à ses volontaires puis leur communiqua les premiers résultats officiels – concluants – de l’expérience. Un mois plus tard il vint leur fournir les résultats définitifs. Il s’avéra que le groupe expérimental accomplit un réduction de sa consommation d’énergie équivalente à 25 % et ce, sans éprouver la moindre gêne. Le résultat fut à priori durable, du moins si l’on en croit les mesures post-expérimentales qui furent réalisées sur deux mois. Ce changement comportemental se traduisit également, par phénomène de rationalisation, par une modification des attitudes vis à vis des économies d’énergies, celles-ci apparaissant désormais aux volontaires comme une cause des plus défendables et des moins coûteuses en termes de gêne personnelles. Il y a fort à parier qu’ils maintinrent par la suite ces comportements et attitudes notamment hors du cadre professionnel à la plus grande joie de leur portefeuille.
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